Fiche de Synthèse : L’Exécution du Contrat
I. La Force Obligatoire des Contrats
A. Obligation d’Exécuter le Contrat entre les Parties
- Le contrat est la loi des parties (Art. 1103 C.civ.) :
- Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
- Irrévocabilité unilatérale : Une partie ne peut se soustraire seule à ses engagements. Ce que les parties ont fait, seules les parties peuvent le défaire.
- Exécution de toutes les obligations prévues.
- L’exécution doit être de bonne foi (Art. 1104 C.civ.) :
- Disposition d’ordre public. S’applique à la négociation, formation et exécution.
- Devoir de loyauté : Sanctionne comportement malhonnête/trompeur.
- Devoir de coopération/collaboration : Le créancier doit faciliter l’exécution par le débiteur.
- Étendue de la force obligatoire selon le type d’obligation :
- Obligation de moyens : Le débiteur s’engage à utiliser tous les moyens possibles pour atteindre un résultat, sans garantir le résultat lui-même (ex: médecin). Faute prouvée si diligence insuffisante.
- Obligation de résultat : Le débiteur s’engage à atteindre un résultat précis (ex: transporteur livrant une marchandise). Faute présumée si résultat non atteint (sauf cause étrangère).
- Intérêt de la distinction : Détermine la charge de la preuve de la faute en cas d’inexécution.
B. Interprétation du Contrat par le Juge (limites à la force obligatoire)
- Principe : Le juge ne doit pas dénaturer un contrat clair.
- Si ambiguïté, recherche de la commune intention des parties.
- Règles d’interprétation encadrées :
- Termes obscurs/ambigus : Recherche de la commune intention.
- Intention non décelable : Interprétation selon un standard (contractant moyen).
- Multiples clauses peu claires : Recherche de cohérence d’ensemble.
- Contrat de gré à gré : Interprétation défavorable au créancier, favorable au débiteur.
- Contrat d’adhésion : Interprétation favorable à l’adhérent.
- Clauses contradictoires : Sens qui produit un effet retenu.
C. La Révision du Contrat pour Imprévision (Art. 1195 C.civ.)
- Si un changement de circonstances imprévisibles à la conclusion rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque.
- Conditions :
- Changement de circonstances imprévisible.
- Exécution excessivement onéreuse.
- Parties n’ont pas accepté le risque d’imprévision.
- Procédure :
- Demande de renégociation au cocontractant (exécution continue pendant ce temps).
- En cas d’échec/refus : Commun accord pour résolution ou adaptation par le juge.
- À défaut d’accord dans un délai raisonnable : Le juge peut réviser ou mettre fin au contrat.
D. Exceptions à la Force Obligatoire du Contrat
- L’ordre public : Les parties ne peuvent déroger aux règles d’ordre public.
- Les clauses abusives (contrats consommateur/professionnel) : Créent un déséquilibre significatif au détriment du consommateur (ex: clause exonérant le vendeur de toute responsabilité).
- L’imprévision (voir ci-dessus).
II. Le Principe de l’Effet Relatif des Contrats
- Principe (Art. 1199 & 1200 C.civ.) :
- Le contrat ne crée d’obligations qu’entre les parties.
- Les tiers ne peuvent ni demander l’exécution, ni être contraints de l’exécuter.
- MAIS, les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat (opposabilité). Ils peuvent s’en prévaloir (ex: preuve d’un fait).
- Les Limites : Les Ayants-Cause
- Personnes tenant leur droit/obligation d’une partie au contrat.
- Ayants-cause à titre universel (héritiers) : Reçoivent l’intégralité ou une quote-part du patrimoine. Succèdent aux droits et obligations du défunt (sauf exceptions).
- Ayants-cause à titre particulier (acheteur d’un bien) : Reçoivent un bien/droit spécifique. Certains contrats peuvent leur être transmis par la loi (ex: contrat de travail en cas de vente d’entreprise).
- L’Action Oblique et Paulienne (protection des créanciers contre l’inaction/fraude du débiteur)
- Action oblique : Le créancier agit au nom de son débiteur négligent pour exercer les droits de ce dernier contre ses propres débiteurs (reconstituer le patrimoine du débiteur).
- Action paulienne : Permet au créancier d’attaquer les actes frauduleux de son débiteur faits pour organiser son insolvabilité (ex: donation, vente à vil prix).
B. Les Exceptions au Principe de l’Effet Relatif
- La Stipulation pour Autrui : Un stipulant obtient d’un promettant qu’il exécute une prestation au profit d’un tiers bénéficiaire (ex: assurance-vie). Le tiers acquiert un droit direct contre le promettant.
- La Promesse de Porte-Fort (ou promesse pour autrui) : Un promettant (porte-fort) s’engage envers un bénéficiaire à ce qu’un tiers accomplisse un acte ou exécute un engagement. Obligation de résultat pour le porte-fort (convaincre le tiers). Si le tiers refuse, responsabilité du porte-fort (pas paiement de la dette du tiers).
III. Le Paiement, Mode Normal d’Exécution du Contrat
A. Les Parties au Paiement
- Paiement (sens juridique) : Exécution de l’obligation née du contrat (pas seulement somme d’argent).
- Ex: Vendeur “paie” en délivrant la chose, acheteur “paie” en versant le prix.
B. L’Objet du Paiement
- Chose ou prestation. Doit correspondre à ce qui est prévu au contrat (nature, qualité). Paiement partiel peut être refusé si non prévu.
C. Date et Lieu du Paiement : Selon ce qui est convenu au contrat.
D. La Preuve et les Effets du Paiement
- Preuve à la charge du débiteur qui se prétend libéré (par tout moyen, car fait juridique).
- Effet : Libère les parties de leurs obligations, éteint l’obligation.
- Subrogation personnelle : Un tiers (solvens) paie la dette du débiteur au créancier. Le solvens est subrogé dans les droits du créancier et peut se retourner contre le débiteur (ex: mécanisme des assurances).
IV. Les Sanctions en Cas d’Inexécution du Contrat
A. Sanctions Visant à l’Exécution du Contrat
- L’Exécution Forcée (en nature) : Obliger le débiteur défaillant à s’exécuter.
- Mise en demeure préalable nécessaire.
- Obligation de donner (somme d’argent) : Saisie des biens du débiteur.
- Obligation de faire : Pas toujours possible (si intuitu personae, réparation par D&I). Retard de livraison peut se résoudre par livraison tardive.
- Obligation de ne pas faire : Si violation (ex: concurrence), souvent réparation par D&I.
- L’Exception d’Inexécution : Suspension de sa propre obligation si le cocontractant n’exécute pas la sienne. Inexécution doit être suffisamment grave.
- La Mise en Jeu de la Responsabilité Contractuelle : Réparation du préjudice subi du fait de l’inexécution.
- Le créancier doit prouver :
- Un fait générateur (faute contractuelle) : Dépend de la nature de l’obligation (moyens/résultat).
- Un préjudice : Matériel, moral, corporel. Doit être :
- Certain (pas hypothétique).
- Direct (lié à la violation contractuelle).
- Prévisible (sauf faute lourde/dolosive).
- Un lien de causalité entre fait générateur et préjudice.
B. Les Causes d’Exonération de Responsabilité
- Le débiteur peut s’exonérer totalement ou partiellement si l’inexécution est due à :
- La Force Majeure (Art. 1218 C.civ.) : Événement échappant au contrôle du débiteur, imprévisible à la conclusion, irrésistible dans ses effets, et non dû au débiteur.
- Le Fait d’un Tiers : Si présente les caractères de la force majeure = exonération totale. Sinon, partielle.
- La Faute du Créancier : Si présente les caractères de la force majeure = exonération totale. Sinon, partielle.
C. Les Effets de la Responsabilité Contractuelle
- Réparation par versement de dommages et intérêts (compensatoires). Évalués au jour du jugement.
D. Les Clauses de Responsabilité
- Clauses définissant l’étendue de la responsabilité :
- Clause pénale : Montant forfaitaire de D&I en cas d’inexécution. Révisable par le juge (si excessif/dérisoire). Exigible dès constatation défaillance.
- Clause limitative de responsabilité : Fixe un montant maximum de réparation. Connue et acceptée.
- Non applicable si : Contredit portée engagement essentiel, envers consommateur/non-professionnel, faute lourde du débiteur.
- Clause de non-responsabilité (exonératoire) : Exclut la responsabilité. Vise à protéger contre réclamations (sauf faute grave, dol, obligation légale impérative). Non applicable si faute lourde/dol.
- Aménagements conventionnels des obligations :
- Clause de réserve de propriété : Vendeur reste propriétaire jusqu’à paiement complet.
- Clause attributive de juridiction : Détermine tribunal compétent (valable entre commerçants si apparente).
- Clause résolutoire : Résolution de plein droit si manquement à obligation essentielle (après mise en demeure). Doit mentionner engagements concernés.